Valérie Gavaret - Sophrologie & formation

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Valérie GAVARET
Sophrologue à Fontainebleau
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BLOG

Non, trois fois non, les sophrologues ne sont pas des maîtres spirituels.

14/10/2024

Non, trois fois non, les sophrologues ne sont pas des maîtres spirituels.

La sophrologie est donc une praxis, c’est-à-dire un ensemble de pratiques qui ne sont pas seulement contemplatives ou théoriques, et une philosophie de vie, jusque dans notre relation affinée à notre corps, nos sens, jusqu’au cœur de notre quotidien. Le Professeur Alfonso Caycedo disait d’ailleurs, dès 1970, qu’elle constituait « une discipline existentielle »1, du travail sur notre schéma corporel à l’exploration de nos Valeurs. La sophrologie permet donc d’affirmer notre position de sujet, sans que cela tourne à l’obsession nombriliste. Au contraire. Alfonso Caycedo insistait sur le fait que ce travail sur soi – littéralement en conscience – sert à une meilleure « intégration dans la société »2.

Pour cela, la sophrologie s’appuie sur un socle philosophique : en premier lieu, Platon, son Charmide3 et son Allégorie de la Caverne4 et surtout la phénoménologie 5 d’Edmund Husserl.

 

Dans ce projet, les sophrologues sont des passeurs.

Le Pr Caycedo insistait sur cette dimension de transmission : « En fait notre art est pédagogique »6 jusqu’au cœur du Troisième Cycle, celui des questions existentielles de liberté, tridimensionnalité,responsabilité ou encore dignité.

Mais il est un positionnement que le ou la sophrologue ne saurait adopter. C’est celui de guide spirituel. Alfonso Caycedo a bien exploré le bouddhisme tibétain et le zen japonais. Il a également étudié les pratiques des yogis. Mais son but n’a jamais été de constituer une école spirituelle, ni de composer une nouvelle mystique. Seule le passionnait la création d’une méthode d’exploration de la conscience par le sujet lui-même.

Malgré d’assez profondes divergences sur certains points, Alfonso Caycedo éprouvait aussi un respect réel pour les traditions spirituelles des maîtres qui lui avaient ouvert grand leurs portes, comme en témoigne ce commentaire sur le yoga :

«… il n’existe pas de vrai yoga indien sans la croyance en la réincarnation. La pratique du yoga vise à rompre le cycle des réincarnations. Et si vous dites ne pas y croire, alors pourquoi pratiquez-vous le yoga ? (...)Vous imaginez ! Le yoga pour aider ces dames à perdre du poids !Ce yoga-là n’est pas le vrai yoga ; (...)et les choses sérieuses, n’y touchez pas ! Cela fait partie de toute cette banalisation autour de l’Orient. Ici, en Occident, nous sommes mal « orientés » sur l’Orient." 7

Pour autant, il n’a jamais été question d’intégrer ces spiritualités à la sophrologie car ces croyances « ne font partie ni de son référentiel conceptuel et théorique ni de sa méthodologie»,8 tout entiers portés par l’entraînement à la suspension des jugements et autres filtres. Ni elles, ni aucune autre religion.

La sophrologie est tout aussi aconfessionnelle qu’elle est apolitique et les sophrologues ne reçoivent donc pas de formation dans le domaine.

 

Et le fait religieux en sophrologie ?

Le religieux comme l’athéisme font partie des caractéristiques individuelles que les sophrologues s’engagent à respecter chez leurs client.e.s. Ce respect est d’ailleurs inscrit dans le codes de déontologie des différentes instances représentatives de la profession, comme celui de la Société Française de Sophrologie, par exemple : « La sophrologie dans ses branches médicales, paramédicales et sociales, est une discipline du domaine des sciences humaines. Elle implique la mise en œuvre de moyens qui tendent vers l’autonomie et le mieux-être des patients/clients/élèves dans le respect des croyances de chacun, religieuses, politiques, philosophiques. »

 

Quand survient un appel à la transcendance, un besoin de s’engager dans une quête spirituelle, il convient donc de s’adresser à des représentants du courant cultuel dans lequel on choisit de s’inscrire car chacun à ses textes sacrés, ses modes de penser et ses rituels.

 

 

1 Caycedo, Natalia (2019). Alfonso Caycedo, Le Parcours hors du commun du créateur de la sophrologie (p.250)

2 Ibid. (p. 254)

5 Philosophie qui écarte toute interprétation abstraite pour se limiter à l’observation et la description de ce que nous percevons du monde. Méthode associée qui propose un retour aux choses mêmes en s’entraînant à suspendre ce que l’on croit en savoir.

6 Op. Cit. (p.204)

7 Op. Cit. (pp. 201-202)

8  Op. Cit. (p.63)

A quoi sert de donner une intention aux exercices de sophrologie ?

21/08/2024

A quoi sert de donner une intention aux exercices de sophrologie ?

Commençons par une clarification : une intention, c’est un « mouvement intérieur par lequel une personne se propose, plus ou moins consciemment et plus ou moins fermement, d'atteindre ou d'essayer d'atteindre un but déterminé, indépendamment de sa réalisation, qui peut être incertaine… »[1] Un objectif, lui, constitue le « but déterminé d'une action »[2]. En résumé, l’objectif est le but que l’on vise; l’intention – plus précisément l’ensemble de nos intentions - est le mouvement intérieur qui nous en rapproche progressivement et nous permet de l’atteindre.

Et ce mouvement intérieur, ce mouvement de notre conscience donc, est mouvement vers… Pas seulement en sophrologie. Dans tous les domaines, même les plus quotidiens : si je vous dis « j’ai l’intention » et que je m’arrête là…

Qu’elle est votre réaction ?

Oui , bien sûr ! Il vous vient l’envie de me demander : « l’intention de quoi ?! »

Précisément, toute intention est intention de... Même l’intention de ne pas faire, de ne rien faire est intention de… Un mouvement s’opère, de notre conscience vers une expérience dans le monde extérieur.

Donner une intention à une pratique consiste donc en un processus d’orientation active de l'attention : les techniques de relaxation/activation dynamique, comme celles d'imagerie mentale, que vous allez utiliser en sophrologie sont des outils assez polyvalents : vous allez les mettre en œuvre pour... quoi, précisément ? Avec quelle intention ? En d'autres termes, quelles ressources, quelles capacités souhaitez-vous activer ?

 

Je vous propose quelques repères pour vous aider à formuler vos intentions, en sophrologie et en d’autres lieux si l’expérience vous en dit :

 

  1. Optez pour une formulation affirmative et positive. Nulle pensée magique ici. L’enjeu est très pragmatique. Imaginez un groupe d’enfants à qui l’on demande de ne pas crier – ou même, formulation affirmative qui ne change rien à l’affaire, d’arrêter de crier - cela ne leur dit pas ce qu’ils doivent ou peuvent faire à la place. Doivent-ils se taire ? Peuvent-ils parler à un volume sonore modéré ? Peuvent-ils s’exprimer à condition de chuchoter ? Ils n’en savent rien. [Ne pas + crier] demande à leur cerveau de traiter deux unités d’informations qui, en plus, ne les éclairent pas sur ce qu’ils peuvent ou doivent faire concrètement. Beaucoup de ressources mentales recrutées pour un résultat hasardeux. Eh bien nous sommes toutes et tous ces enfants, quand nous nous donnons des intentions négatives. Elles ne nous permettent pas d’orienter nos ressources cognitives vers un but précis. Veillez donc soigneusement à cet aspect de votre pratique autonome.
  2. Faites court, concis. Les formulations à rallonge sont plus difficiles à garder à l'esprit sans effort, surtout pendant les temps de pratique. De plus, elles sont susceptibles de receler des intentions à tiroir, autant dire plusieurs intentions dans ce qui prétend n'en être qu'une. Cette pratique est contre-productive. Dispersion mentale garantie ! Exemple : plutôt que ‘Booster une ressource de réussite pour renforcer ma confiance en moi’, ‘réveiller un souvenir de réussite’ ou ‘réveiller une ressource de confiance en moi.’ 
  3. Vous allez utiliser les techniques sophrologiques afin d'améliorer quelque chose de nature à vous permettre d’atteindre votre objectif. Cette intention ne reflète donc pas un état acquis mais un processus. Il est donc important de faire reposer vos intentions de pratique sur un verbe d'action. Exemple : plutôt que ‘Être plus solide sur mes appuis ’, ‘prendre conscience de mes appuis’ ou ‘améliorer mes appuis’ ou encore ‘renforcer la solidité de mes appuis’. Vous verrez bien, au terme de la pratique, ce que vous percevez, ce que cela a modifié - ou pas - et surtout, combien de temps cet état de corps persiste, avant d’être durablement intégré. Ainsi, vous ne présumez pas du résultat. Au contraire, vous intégrer tranquillement le fait que tout ne soit pas tout cuit du premier coup. Et ça, c’est un antidote précieux au découragement!
  4. Les exercices de relaxation/activation dynamique requièrent une précaution que les techniques statiques ne nécessitent pas :  il est impératif de formuler une intention de pratique qui concorde avec les gestes et/ou mouvements réalisés pendant l’exercices. Sans cette précaution, vous aurez comme une impression de dissonance. entre votre mental et votre corps. Dans ce cas, c'est votre corps qui a raison puisque c'est lui qui, à travers le mouvement, incarne l'intention première de l'exercice.

 

Vous l’avez compris, poser vos intentions demande que vous y consacriez un peu de temps. Un petit investissement en temps pour de grand effets en termes de sens donné à votre parcours sophrologique et en termes d’autonomie : vous savez faire pour vous-même, par vous-même et pouvez échanger à ce propos avec votre sophrologue, en pratiquant.e éclairé.e. Réfléchissez donc à ce que vous avez besoin d'activer afin atteindre votre objectif, progressivement, comme on construit un édifice : brique après brique, étape par étape, avec patience et méthode. A force de répétition consciente, intentionnelle, cela vous deviendra de plus en plus facile. Puis un jour, mobiliser cette ressource vous sera devenu facile. Bon entraînement !



[1] CNRTL. https://www.cnrtl.fr/lexicographie/intention

[2] CNRTL. https://www.cnrtl.fr/definition/objectif

Phénoménologie : même pas peur !

22/05/2024

Phénoménologie : même pas peur !

En tant qu’artiste de spectacle vivant, la notion de répétition est familière à ce jeune homme. Il répète en solo, il répète en orchestre. Il fait répéter ses élèves aussi. Jouer et rejouer une œuvre pour la maîtriser techniquement et en améliorer l’interprétation constitue une discipline professionnelle qui a, depuis longtemps, infusé dans sa vie entière. Il y a cette compréhension commune aux artistes, sportifs et sportives ainsi qu’aux professionnels qui doivent acquérir les gestes justes de leur métier : la maîtrise s’atteint en s’exerçant. Mais pas n’importe comment. C'est là que le nouveau regard de la pratique phénoménologique vient à la rescousse et vous allez voir, l'expression peut vous paraître impressionnante mais c'est plutôt sympa. Alors comment procéder ?

 

Je vous en parlais dans mon billet sur la pratique personnelle comme clé de l’autonomie[1] : c’est vrai aussi des savoir-être qui nous permettent de créer une nouvelle relation à nous-même. En la matière, la sophrologie ne fait donc pas exception. Cependant, s’il s’agit bien de faire et refaire, pas question pour autant de procéder de façon machinale car le risque est alors d’ancrer un peu n’importe quoi, n’importe comment, là où il devrait y avoir un processus d’amélioration, d’affinage et un enrichissement de la conscience. Et c’est très vite fait.

 

La répétition automatique : ennui et stagnation

Répéter de façon automatique finit par être ennuyeux à mourir. C’est une des raisons pour lesquelles la répétition a souvent mauvaise presse. À se prendre pour un automate, on se construit une vie de machine. Sans âme, sans saveur. Répéter, pour soi ou pour les autres – ses enfants, ses élèves, ses subalternes aussi – devient alors profondément agaçant. D'autant qu'à procéder toujours de la même façon, on obtient les mêmes résultats. Un beau jour, ce mode de répétition stérile finit par ne plus faire sens. Nous voilà coincés dans Un jour sans fin[2]. Sans la Marmotte...

Si vous avez cette impression, c’est tant mieux ! Vous pouvez remercier votre insatisfaction : vous avez la confirmation que vous n’êtes pas un cyborg. Vous êtes doué.e de conscience et de sensibilité. Vous allez pouvoir remettre – ou commencer à mettre – de l’attention, de la présence dans ce que vous faites.

 

La répétition phénoménologique : une pratique de présence

C’est ici qu’intervient la pratique phénoménologique. Inspirée par la philosophie d'Edmund Husserl[3], la phénoménologie nous invite  vraiment à observer et à décrire nos expériences comme si c’était la première fois, et voir ce qui se passe. Cette approche encourage une attention renouvelée, agrémentée d'une pointe de curiosité, et transformant la répétition en une opportunité d'exploration et de découverte.

 

Comment Répéter avec attention et présence ?

1. Observez attentivement. Chaque fois que vous répétez une action, aussi simple que boire un café ou aussi complexe que jouer un morceau de musique, observez la attentivement. Quels sont les sensations dans votre corps ? Peut-être aussi les perceptions sensorielles liées à votre environnement. Quelles sont vos émotions, vos pensées ? Abordez chaque répétition comme une nouvelle expérience et accueillez ce que cela vous fait vivre.

2. Suspendez vos jugements[4]. Mettez entre parenthèses vos habitudes de pensée ainsi que vos attentes. Celles des autres aussi, d'ailleurs. Si vous buvez un café, la pensée qui surgira le plus rapidement sera probablement quelque chose comme " oui, bon, c’est un café, quoi." A la place, le temps de quelques minutes, jouez à faire comme si vous débarquiez d’une autre dimension et découvriez cette boisson pour la première fois. Concentrez vous sur sa couleur dans votre tasse, les nuances des odeurs, des saveurs, textures et arômes en bouche. Dégustez, en somme.

3. Décrivez ce que cela vous fait vivre[5]. Prenez le temps de décrire votre expérience de manière détaillée. Laissez de côté toute tentative d’analyse.  Notez ce que vous ressentez, voyez, entendez, et percevez. Cette description détaillée enrichit votre compréhension et votre appréciation de l'expérience. Il n’est même pas nécessaire de le faire par écrit. Vous pouvez prendre le temps de mettre des mots dessus, dans votre tête. Arrivé.e à ce point de l’expérience, vous avez réalisez une prise de conscience, directe, de première main.

4. Explorez l’intentionnalité. Ultime étape de cette pratique phénoménologique du quotidien : réfléchissez à la relation entre votre conscience et l’objet de votre observation. Autrement dit, à votre relation à votre expérience du moment. Comment une exploration attentive change-t-elle à chaque répétition ? Qu'est-ce qui produit cette variation ? Qu’est ce que cela change de réaliser une action peut-être ordinaire, peut-être connue, courte, avec l’intention de la redécouvrir comme si c’était la première fois ?  Quels nouveaux aspects cela vous permet il de découvrir ?

 

Dans notre vie quotidienne comme dans la pratique de la sophrologie, adopter cette approche phénoménologique de la répétition offre plusieurs avantages :

  • Nous améliorons nos capacités de perception. En abordant chaque répétition avec une attention renouvelée, nous découvrons de nouvelles dimensions et nuances dans nos expériences.
  • C’est ainsi que nous enrichissons notre conscience. Cette pratique encourage une présence et une conscience accrues, accessibles à tout le monde et nous replace au centre de l’expérience.
  • C’est un super antidote à l’ennui. En transformant la répétition en une exploration constante, nous maintenons un intérêt vivant pour nos activités même les plus ordinaires. Elles gagnent ainsi en saveur et en sens. Ou pas ! C’est alors un signal intéressant qu’il peut être temps, dans la mesure du possible, d’arrêter ou de remplacer ces routines insipides.

 

En résumé, la proposition de répéter comme si c'était la première fois et voir ce qui se passe, bien que paradoxale, nous invite à réévaluer notre rapport à la répétition. En adoptant une approche phénoménologique, nous transformons les actions routinières en opportunités de découverte et d’enrichissement.

Que ce soit dans la pratique artistique, sportive, professionnelle ou dans la vie quotidienne, cette perspective nous permet de vivre chaque moment avec une attention renouvelée et une appréciation profonde. L'expérience, l'exploration passent en premier. Ce que l'on peut en penser vient après. Essayez et voyez comment votre perception de la réalité peut se transformer. Et vous savez quoi ? C’est la base fondamentale de la sophrologie !



[1] Pour aller plus loin sur le sujet : https://www.valeriegavaret.fr/BLOG.J/b43453a/La-pratique-personnelle-element-cle-de-l-autonomie

[2] Un Jour sans fin, film de Harold Ramis avec Bill Murray, 1993

[3] Edmund Husserl,1859-1938, philosophe et logicien, autrichien de naissance puis prussien, fondateur de la phénoménologie, qui eut une influence majeure sur l'ensemble de la philosophie du XXᵉ siècle.

[4] Pour aller plus loin sur le sujet: https://www.valeriegavaret.fr/BLOG.J/b52563a/Allez-chiche-suspendons-nos-jugements-

[5] Pour aller plus loin sur le sujet : https://www.valeriegavaret.fr/BLOG.J/b41305a/Vous-avez-dit-phenodescription-

 Photo : Engin Akyurt

De l'intérêt de choisir un.e sophrologue formé.e en présentiel.

12/05/2024

De l'intérêt de choisir un.e sophrologue formé.e en présentiel.

Si vous souhaitez apprendre à nager, je vous propose d’opter pour un maître-nageur:

• Qui n’a jamais pratiqué la natation pour lui-même. (Pourquoi faire ? Il n’en ressentait pas le besoin.)

• Qui s’est formé entièrement en distanciel. Mais attention, en distanciel synchrone ! (Rassurez vous : il sait tout du principe de portance dans l'eau et du protocole théorique à dérouler pour vous apprendre à flotter.)

• Qui s’est spécialisé en natation handisport. En distanciel aussi. (Pourquoi diable prendre la peine de rencontrer des personnes en situation de handicap pour de vrai ? Qu’est-ce que ça change ?)

• Qui s’est aussi spécialisé en accompagnement des phobies aquatiques. Bien sûr en distanciel aussi ! (Oh, ça va… On sait ce que c’est, la peur de l’eau…)

 

Comment ça, cela ne vous viendrait pas à l’idée ?! Alors pourquoi le faire au moment de choisir un ou une sophrologue ?

• La sophrologie est une méthode psycho-CORPORELLE. Il y a donc des enjeux du CORPS. Dans le domaine de la respiration, dans les exercices de Relaxation Dynamique en mouvement aussi. Et déjà dans ce domaine, en présentiel, pour différentes raisons, c’est pas gagné ! Alors d’écran à écran…

• En plus, bien sûr que cela fait tout drôle, à ces sophrologues, le jour où ils/elles se retrouvent dans la même pièce qu’une personne qui leur annonce, par exemple, qu’elle est atteinte d’un cancer et les sollicite en soins de support. Ou qui a du mal à faire – ou défaire – son deuil d’un être cher. Ou même qui vit une remontée émotionnelle inattendue... Leurs seules mises en situation auront été des jeux de rôle désincarnés, par écrans interposés. Ils/elles n’auront jamais fait l’expérience corporelle de la charge émotionnelle qui peut s’installer dans un cabinet, dans ce genre de situation, en PRÉSENCE de cet autre dans la peine.

• Et je passe sur les enjeux d’animation et de régulation des pratiques en groupe !

 

Sinon, il y a peut-être des formations BPJEPS de maître-nageur en distanciel…

 

(Illustration : Baywatch, réalisateur : Seth Gordon, 2017)

Allez chiche, suspendons nos jugements  !

26/02/2024

Allez chiche, suspendons nos jugements  !

• Vous avez bien lu : je parle bien de suspension du jugement, pas de non-jugement qui est une toute autre affaire. En tant qu'espèce, nous avons développé un cerveau fait pour produire des évaluations de la situation à la vitesse de l'éclair. A l'âge des cavernes, il en allait potentiellement de notre survie, à tout moment, à chaque rencontre : cet être, là, à quelques mètres de moi, était-il un allié potentiel, une menace ou encore mon futur dîner ? Il fallait statuer vite. Aujourd'hui encore, il en reste quelque chose dans les structures de notre encéphale, notre fonctionnement mental et notre comportement. Ajoutons à cela les effets de la répétition, qui confirment et ancrent les informations en question, et nous avons des schémas prêts-à-penser. De vrais boulevards le long desquels les informations circulent à la vitesse de l’éclair, nous privant souvent de la possibilité de nous demander si elles sont même (encore) pertinentes pour nous. Ces informations deviennent des évidences.

• C’est là que la sophrologie a une carte intéressante à jouer : elle nous permet d'embrasser cette nature humaine et de la prendre comme matière première de notre travail sur nous-mêmes, sans pour autant acheter cash tout ce que nous soufflent nos schémas mentaux. Au moins temporairement, cesser de penser comme on a toujours pensé, cesser de faire comme on a toujours fait. Alors comment procéder ?

• En préambule, précisons le périmètre de ce que l'on appelle jugements. Ce sont toutes les idées préconçues, les à-priori, habitudes de pensées, les partis pris, les suppositions, croyances et généralisations qui nous éloignent de l'expérience directe du monde. Tous ces éléments constituent des filtres entre nous et la réalité - parfois même entre nous et... nous-mêmes. Et en soi, ce n'est pas un drame, c'est l'expérience d'être humain : nous naissons immatures, physiquement et mentalement, et intégrons les codes des différents groupes sociaux dans lesquels nous grandissons. Quelques exemples ? 'Le monde est un lieu hostile, méfie-toi.' 'Étaler ses émotions en public, ça ne se fait pas. Un homme, ça ne pleure pas.' 'Tu t’écoutes trop, ma pauvre fille…' (Je parie que d’autres exemples, issus de votre histoire personnelle, vous sont venus à l’esprit.) Le résultat est une relation au monde dont les paramètres échappent largement à notre conscience alors que nous les trimbalons en nous depuis parfois fort longtemps. En sophrologie, c'est ce que nous appelons l'attitude naturelle.

• Revenons maintenant à la suspension du jugement. Il s’agit d’adopter un positionnement mental qui consiste à choisir de vivre tout exercice sophrologique - et pourquoi pas, plus largement, toute expérience de vie qu'il nous plaît d'explorer - comme si c'était la première fois. Comme si... S'il ne s'agit pas d'une vraie première fois, nous le savons bien. Pour autant, ce 'comme si...' nous permet de vivre ce qui nous est donné à vivre en mettant temporairement de côté ce que nous en croyons en savoir, afin de renouveler l'expérience que nous en faisons. D'en faire une expérience plus directe, actualisée. Comme un voyageur se met au défi d’explorer une terre pas du tout inconnue avec un regard neuf. Autant dire que c’est une expérience de pleine présence qui mobilise puissamment la conscience.

• Et puis suspendre, ce n'est en aucun cas tout jeter aux orties. C'est littéralement faire tenir une chose de manière à ce qu'elle soit en suspension dans les airs. Si je suspends un vêtement, je ne le jette ni à terre, ni à la poubelle. Je peux le récupérer plus tard si je le souhaite. C'est aussi interrompre temporairement un processus, comme le juge suspend une audience. Autant d'actions qui permettent de créer de la disponibilité en nous, de questionner ce que nous tenons pour vrai et, dans le cas de la suspension de nos filtres dans la pratique sophrologique, de faire une expérience bien plus directe. C'est une mise entre parenthèses, un espace-temps  suspendu, propice aux prises de conscience basées sur l’expérience vécue.

• Dans ce domaine, une attitude assez répandue consiste à suspendre uniquement ce que l'on considère comme négatif. Cela peut paraître confortable mais ce n'est que la moitié du travail. Un filtre positif reste un filtre. (Et puis est-il si positif que cela ? L’est-il seulement encore ?) La suspension du jugement consiste à suspendre même l'étiquetage positif/négatif, binaire et réducteur par nature. C'est s'autoriser à faire une expérience et voir ce qui se passe. C'est renoncer à se mettre en attente - qu'elle soit négative ou positive - à priori. Et à partir de cela, observer si l’expérience vécue va dans le sens de ce qui est bon pour nous, de ce qui nous est utile, bénéfique. Ou pas.

• En conclusion, "il s'agit d'apprendre à ne rien supposer, ne rien déduire, à rencontrer la chose sans a priori," nous dit Richard Esposito dans son lexique des concepts de la sophrologie (Esposito et al, 2010). Le cœur de la suspension du jugement, c'est donc faire et voir ce qui se passe, un processus à renouveler encore et encore. Et encore... Tout un apprentissage ! Et gardons à l'esprit qu'accepter n'est pas se résigner. Une fois l'expérience faite, nous pouvons choisir de nous délester de ce qui est caduque et nous encombre, et de valoriser ce qui nous apparaît comme bon pour nous.